Michaël De Man graduated as Master in Economics at Ghent University in 2005. Driven by a strong interest in investments, he obtained a Master in Banking and Finance at the same university. After his studies he started as a bond specialist for a large Belgian bank. In that period, he also became CFA charterholder. In the aftermath of the financial crisis, he dedicated himself to risk management. At the end of 2015, he joined the investment team of Econopolis, where he focuses on the bond strategy
Faire une croix sur les obligations ? Pas si vite...
Les emprunts d’État des principaux pays industrialisés sont sur un marché haussier séculaire depuis plus de 30 ans. Depuis les années 1980, les taux d'intérêt à long terme sur les emprunts des États les plus solvables sont sur la spirale descendante. Cette situation a fait flamber la valeur de cette réserve d’obligations mondiales. La valeur d’une obligation est en effet inversement corrélée aux taux d'intérêt : de manière générale, plus les taux baissent, plus la valeur d’une obligation augmente.
Le graphique suivant illustre l’évolution crescendo de la valorisation des obligations depuis 2015. La courbe ascendante s’explique évidemment par la politique monétaire particulièrement accommodante, mais aussi par une demande soutenue pour ces valeurs, surtout du côté des investisseurs institutionnels, comme les assureurs et les grands fonds de pension.
Total Return Index of Global Bonds
Plusieurs segments
Si nous avançons (à juste titre) que les obligations sont surévaluées, il convient toutefois de nuancer. Nous parlons ici des emprunts d’État des pays de l’OCDE. Si nous élargissons notre horizon pour regarder du côté des obligations des pays émergents (emerging market debt), le tableau est différent.
Les obligations y sont en effet globalement plus intéressantes que dans les pays industrialisés. Ces États sont souvent moins endettés, ils ont moins d’engagements à tenir en matière de retraites et leur profil démographique est aussi plus favorable (population active plus jeune).
Ces obligations peuvent être émises par l’État comme par les entreprises (corporate debt). Elles peuvent aussi être libellées en devise locale comme en devise forte (généralement USD ou EUR). Dans le second cas, l’investisseur court un risque de change moindre, mais il ne pourra pas non plus profiter de la convergence des devises locales attendue à terme dans ces pays. ‘Convergence’, tel est le maître mot : à terme, on assistera à une convergence des différentiels de taux (différence des taux par rapport aux obligations de l’OCDE) et des devises de ces obligations. Intéressant pour les investissements.
Ces obligations restent cependant faiblement représentées dans les principaux indices obligataires du monde. Dans l’indice Bloomberg Barclays Global Aggregate (un important indice mondial, large et diversifié), la pondération de toutes les obligations des marchés émergents ne représente toujours que 6%, avec seulement 2% pour la Chine et l’Inde, alors que ces deux pays contribuent ensemble à environ 27% du PIB mondial. Malgré les bonnes performances de cette classe d'actifs, les investisseurs détiennent donc toujours peu d’obligations des marchés émergents en portefeuille.
Diversification et rendement
Les obligations des pays émergents offrent une bonne diversification au sein d’un portefeuille largement bien réparti. Elles peuvent améliorer son profil risque-rendement.
En moyenne, les rendements ont dépassé légèrement les 10% en 2019. Les meilleures performances sont à mettre à l'actif des emprunts d’État russes et mexicains, qui ont réalisé des rendements de plus de 20%. Les obligations indonésiennes, philippines, thaïlandaises et sud-africaines n’en étaient pas loin. Ces solides rendements sont le fruit de la hausse des devises, de la baisse des taux et du rendement courant.
La politique d'assouplissement monétaire de l’Occident soutient clairement les obligations des pays émergents. Les investisseurs se ruent sur les classes d'actifs et les régions où ils peuvent encore obtenir un rendement convenable (search for yield). Logiquement, ils se tournent vers les marchés émergents.
Gestion active
Une gestion active est indispensable. Le profil de risque des obligations des pays émergents est toujours supérieur à celui des emprunts d’État ‘classiques’.
Chez Econopolis, nous n’investissons pas dans les obligations des pays émergents à travers des trackers. Dans ces produits passifs, ce sont en effet les pays les plus endettés qui sont les plus pondérés. C’est une chose que nous voulons absolument éviter. Nous passons aussi les émetteurs au crible du développement durable, comme nous le faisons dans nos fonds d'actions des marchés émergents. Notre antenne de Singapour nous confère à cet égard un précieux avantage. Nous disposons ainsi de l’expertise nécessaire pour incorporer en toute confiance cette classe d'actifs dans nos portefeuilles.
Même après le rallye sur les pays émergents, la valorisation de ces obligations reste attrayante par rapport aux obligations d’entreprise (à haut rendement). Pour 2020, nous entrevoyons toujours du potentiel dans ces obligations. De plus, les facteurs conjoncturels soutiennent toujours les obligations des pays émergents.
Les obligations ont donc toujours leur place dans le portefeuille, même si les emprunts d’État classiques de l’OCDE ne remplissent plus ce rôle comme par le passé, vu les taux d’intérêt extrêmement faibles, voire négatifs. Les valorisations ont trop grimpé pour que ces obligations puissent encore servir de ‘matelas’. Les obligations des marchés émergents sont en train de devenir une alternative intéressante, pour autant qu’on mène une gestion active et professionnelle.