Gino Delaere is master in Applied Economics (University of Antwerp) and holds an MBA (Xavier Institute of Management in Bhubaneswar, India). For over a decade he has been specializing in emerging markets worldwide and traveling the world looking for interesting investment opportunities. Previously he worked for several large asset managers where he was actively involved in several thematically inspired equity funds. Today, as the head of the Econopolis office in Singapore, he spends a significant amount of his time in Asia and Latin America, and is responsible for the stock selection in the emerging markets funds.
L’Europe et les marchés émergents sur la voie de la croissance
» Les économies émergentes offrent un potentiel de croissance pour le commerce et l’innovation en Europe
» L’Europe investit massivement dans les pays émergents, mais elle doit veiller à préserver son approvisionnement et son industrie
Le flirt complexe de l’Europe avec les marchés émergents
Les relations entre l’Europe et les différents marchés émergents sont ancrées dans une histoire complexe de commerce, de colonialisme et de changements géopolitiques. Ces liens se sont développés au fil des siècles et se sont adaptés à l’évolution des flux mondiaux. Dans le contexte actuel, ils présentent à la fois des opportunités et des défis, allant de la coopération économique à un nouvel ordre géopolitique mondial.
Des accords commerciaux aux vagues d’investissement
Au cours de la seconde moitié du XXe siècle et au début du XXIe siècle, les relations entre l’Europe et les marchés émergents se sont développées à un rythme effréné. La mondialisation, les progrès technologiques et l’émergence de nouvelles puissances économiques ont contribué à une dynamique plus réciproque. Des pays comme la Chine, l’Inde et le Brésil sont devenus des acteurs clés dans l’économie mondiale, ce qui a entraîné un changement significatif dans les rapports de pouvoir traditionnels. Dans chacun de ces pays, les entreprises se sont converties en des leaders mondiaux dans leur secteur, comme la société chinoise Tencent, la compagnie indienne Infosys et l’entreprise brésilienne Ambev.
Dans le passé, l’Europe a établi de nombreux partenariats et conclu de multiples accords commerciaux avec différents marchés émergents. Ces accords visent à stimuler le commerce, les investissements et le dialogue politique. L’accord commercial entre l’UE et certains pays d’Amérique du Sud, associés au sein de Mercosur, qui vise à réduire les droits de douane et à renforcer la coopération économique en est un exemple. En outre, les entreprises européennes ont investi massivement dans les marchés émergents, attirées par un marché de consommation en croissance rapide et par des coûts de production plus faibles. Des entreprises telles que Unilever, VW et LVMH sont tout juste quelques exemples bien connus. Dans le même temps, les entreprises des marchés émergents ont également investi en Europe, ce qui a conduit à une plus grande dépendance réciproque. Pensons, par exemple, aux constructeurs automobiles chinois Geely et BYD. Ces flux d’investissement ont contribué à la croissance économique et à l’emploi des deux côtés.
« Si l’Europe parvient à combiner la force politique, économique et militaire de ses pays, son rôle dans le monde pourrait être renforcé. Nous serons toujours un payeur mondial, mais il est temps que nous devenions aussi un acteur mondial. »
Jean-Claude Juncker, ancien président de la Commission européenne – 2018
L’Europe construit des ponts : collaboration avec les marchés émergents
Les relations actuelles entre l’Europe et les marchés émergents offrent de multiples opportunités. La croissance de la classe moyenne dans de nombreuses économies émergentes crée avant tout de nouveaux marchés pour les produits et services européens. La coopération dans le domaine de la recherche et du développement est un autre domaine important. Des initiatives conjointes en matière de science et de technologie peuvent déboucher sur des innovations qui profitent à la fois à l’Europe et aux marchés émergents.
En outre, de plus en plus d’entreprises des économies émergentes s’installent en Europe pour y construire des usines et ainsi produire plus près de leur marché. Dans le contexte géopolitique actuel, caractérisé par des tensions croissantes, cette tendance semble s’accélérer. Cela permet non seulement d’éviter les éventuels droits de douane à l’importation, mais aussi de contribuer à l’emploi local. À l’inverse, les grands marchés émergents continuent de rechercher des investissements étrangers pour renforcer encore davantage leurs propres économies. L’Inde attire actuellement des entreprises internationales, telles que Micron Technology et Hyundai Motor, pour de nouvelles installations d’assemblage et de production.
Poignée de main ou remous : l’Europe sur le fil de la lame
Malgré les nombreuses opportunités, les relations entre l’Europe et les marchés émergents posent encore des défis. La concurrence dans l’industrie et la fabrication est une préoccupation majeure. Les coûts inférieurs de la main-d’œuvre dans les marchés émergents ont entraîné la délocalisation d’activités de production en dehors de l’Europe, ce qui a contribué à la perte d’emplois et à des restructurations économiques dans certains secteurs.
Les différends commerciaux constituent également une source de tension. Les allégations de pratiques commerciales déloyales, telles que le dumping et la violation des droits de propriété intellectuelle, ont donné lieu à des conflits et à l’imposition de barrières commerciales. Cela perturbe non seulement les relations économiques, mais cela érode également la confiance mutuelle. Les différences politiques et culturelles peuvent aussi susciter des frictions. Les divergences de vue sur les droits de l’homme, la démocratie et la gouvernance provoquent régulièrement des tensions diplomatiques, ce qui entrave la coopération.
Perspectives d’avenir
Les relations entre l’Europe et les marchés émergents se sont développées historiquement et continuent d’évoluer dans un monde en constante mutation. Si le commerce, la durabilité et la coopération technologique offrent de grandes opportunités, les tensions géopolitiques et les questions éthiques posent des défis persistants. L’avenir de cette relation dépendra donc de la capacité de l’Europe et des marchés émergents à aligner leurs intérêts communs de manière équitable et durable. Le protectionnisme de Trump représente une occasion pour l’Europe : un partenariat économique équilibré avec la Chine et l’Inde offre d’énormes possibilités aux entreprises occidentales. Go East, Ursula !