Maxim Gilis obtained a Master in Applied Economics at the University of Antwerp in 2015. His master thesis examined the diversification of stocks in emerging markets. Next he obtained an additional Master of Finance at the Antwerp Management School, where he researched sustainable responsible investing for a European asset management company. He joined Econopolis in the summer of 2016.
La perspective d’une augmentation des dépenses de défense laisse son empreinte sur les marchés obligataires européens
» L’augmentation annoncée des dépenses de défense en Europe accroît les besoins de financement attendus, ce qui pourrait avoir un impact sur les émissions des obligations d’État
» Les taux d’intérêt à long terme au sein de l’UEM ont récemment augmenté en raison des réactions des marchés aux plans budgétaires, tandis que les taux d’intérêt à court terme diminuent en raison des baisses de taux attendues de la BCE
L’augmentation des dépenses de défense pèse sur le budget
Il y a encore quelques années, cela était totalement impensable, mais au début de l’année 2025, quasiment tous les pays de l’UE ont annoncé qu’ils allaient augmenter (significativement) leurs dépenses en matière de défense. Cela n’est certainement pas une évidence dans un contexte de dépenses et de déficits budgétaires élevés. En conséquence, les finances publiques sont confrontées à des défis encore plus importants. Des déficits budgétaires plus élevés et des besoins de financement accrus semblent inévitables. En effet, il est peu probable que ces dépenses supplémentaires puissent être entièrement compensées ailleurs, en particulier dans le contexte du vieillissement de la population et de l’augmentation des dépenses sociales.
Des euro-obligations pour la défense ?
Dans le contexte des finances publiques, les euro-obligations sont des instruments de dette communs émis par les pays de la zone euro. Cela semble intéressant, mais comme il s’agit d’une dette partagée, les pays les plus forts de la zone euro redoutaient et craignent encore de finir par payer pour le remboursement. De fait, dans le cas des euro-obligations, les États membres doivent inclure des garanties dans leurs budgets pour les autres États membres. Cela rend l’idée politiquement sensible.
En 2020, par exemple, cinq pays de la zone euro ont voté contre l’émission d’euro-obligations Covid (Pays-Bas, Allemagne, Estonie, Finlande et Autriche). Finalement, les euro-obligations Covid n’ont pas été émises et un système alternatif a été choisi. Cette fois, l’opposition sera plus mitigée, mais il existe de fortes chances que la solution à nouveau envisagée ressemble fortement aux euro-obligations, sans toutefois être explicitement présentée comme telle, comme cela fut le cas lors de la pandémie de Covid. Pensez aux obligations émises par l’Europe (via la Commission européenne), afin que l’on puisse insister, aux Pays-Bas, par exemple, sur le fait qu’il ne s’agit « absolument pas d’euro-obligations ». Techniquement, c’est exact, mais il est peu probable que cela n’empêche le belge moyen de dormir.
Forte hausse des taux d’intérêt à long terme au sein de l’UEM
L’augmentation (annoncée) des dépenses de défense n’a pas non plus laissé les marchés des taux d’intérêt indifférents. Ils ont connu un trimestre agité, en particulier au sein de l’UEM. Par exemple, les taux d’intérêt allemands ont augmenté d’environ 50 points de base en quelques semaines. La principale raison de cette hausse des taux d’intérêt est le fait que l’Allemagne assouplit sa limite d’endettement, ce qui signifie que des dépenses importantes en matière de défense ne relèveraient plus de ce plafond. Cela va de pair avec l’investissement annoncé de 500 milliards d’euros dans les infrastructures allemandes. De plus, la Commission européenne a présenté son plan visant à consacrer 800 milliards d’euros à la défense, dans le but de réarmer l’Europe. Toutes ces mesures stimulent l’activité économique, exercent une pression sur les finances publiques et peuvent avoir un effet à la hausse sur l’inflation. Sans parler des pressions inflationnistes qu’entraîneraient les droits de douane qui pourraient être imposés par Trump. Dans ce contexte, une hausse des taux d’intérêt à long terme était une réaction logique du marché.
Toutefois, tous les taux d’intérêt n’ont pas augmenté au sein de l’UEM. Les taux d’intérêt à court terme ont baissé, comme prévu. Ce segment est principalement axé sur les perspectives immédiates, et la perspective d’une réduction des taux d’intérêt par la Banque centrale européenne en 2025 reste le moteur dominant. La baisse des taux d’intérêt à court terme a également abouti à une réduction des taux d’épargne de plusieurs banques. Ainsi, lorsque l’épargne devient moins attrayante, il redevient plus intéressant d’investir dans des obligations à long terme.
Divergence des taux d’intérêt : hausse des taux à long terme et baisse des taux à court terme au sein de l’UEM
Les taux d’intérêt à long terme sont en baisse aux États-Unis
Alors que les rendements des obligations à long terme ont augmenté dans l’UEM, cela n’a pas été le cas aux États-Unis (USA). Là-bas, les taux d’intérêt ont chuté partout, quoique de manière limitée, y compris sur les obligations ayant des échéances plus longues. La pression potentielle à la hausse sur les taux d’intérêt due à l’augmentation attendue des droits de douane à l’importation et de l’inflation a été plus que complètement neutralisée par les craintes de récession découlant de la politique du président Trump. La combinaison des barrières commerciales, de la volonté de réforme de la fonction publique, dans laquelle Musk joue un rôle majeur, et de la baisse de confiance des consommateurs alimente de plus en plus les spéculations sur une récession imminente. Les craintes d’une hausse de l’inflation ne l’ont donc pas emporté sur les craintes d’une « Trumpcession ».
Obligations indexées sur l’inflation : sur-performantes ?
Dans le climat actuel, où les craintes d’inflation (alimentées par divers tarifs douaniers à l’importation) refont surface, on pourrait s’attendre à ce que les obligations indexées sur l’inflation obtiennent de bons rendements, et en tout état de cause, supérieurs à ceux des obligations ordinaires. La réalité est cependant plus complexe. Les obligations à court terme indexées sur l’inflation ont effectivement obtenu de bons résultats. Aux États-Unis, l’inflation attendue pour les échéances à deux ans, par exemple, a augmenté de 60 points de base. Toutefois, pour les obligations à plus long terme, avec des taux d’intérêt à 10 ans, par exemple, la hausse de l’inflation attendue ne s’est pas matérialisée. Ainsi, compte tenu de la politique actuelle de Trump, le marché s’attend à une inflation plus élevée à court terme, mais prévoit une baisse à long terme, en raison de l’impact économique sur la croissance économique. Dans ce contexte, les obligations indexées sur l’inflation demeurent un instrument intéressant pour protéger un portefeuille contre la hausse de l’inflation.
Prévisions d’une inflation en hausse à court terme, perspectives stables à long terme aux États-Unis
Le différentiel de taux d’intérêt entre les États-Unis et l’Allemagne accuse une chute significative
L’évolution divergente des taux d’intérêt entre l’UEM et l’Allemagne a entraîné une réduction significative du différentiel de taux d’intérêt entre les deux régions. Ainsi, le différentiel entre les taux à 10 ans a chuté de 70 points de base pour atteindre environ 150 points de base (toujours en faveur des États-Unis). Ce qui n’est certainement pas encore un niveau bas au regard des normes historiques. Il n’est pas surprenant que l’évolution des taux d’intérêt ait été l’une des principales raisons de la chute du dollar américain par rapport à l’euro au cours du premier trimestre.
Forte baisse du différentiel de taux d’intérêt (spread) entre les États-Unis et l’Allemagne : le marché intègre les risques de récession aux États-Unis dans les cours
Les obligations d’entreprises résistent (pour l’instant)
Ces dernières semaines ont été un peu plus difficiles pour les obligations d’entreprises. Elles ont chuté en même temps que les obligations d’État sûres. Néanmoins, nous ne pouvons assurément pas encore parler d’une crise sur le marché des obligations d’entreprises. Au contraire, la rémunération d’intérêt supplémentaire (spread) sur les obligations d’entreprises reste à un niveau similaire à celui du début de cette année, et ce point de départ était particulièrement bas. C’est précisément pour cette raison que la vigilance reste de mise. Si la correction se poursuit sur les marchés boursiers, l’impact sur les obligations d’entreprises risque de s’accentuer.
Le différentiel de taux d’intérêt sur les obligations européennes de qualité (« investment grade ») se rapproche de son plus bas niveau historique
Pays émergents : un démarrage en force, mais Trump et les tensions commerciales suscitent des turbulences
Le terme « volatile » est sans aucun doute le plus approprié pour décrire l’année 2025 jusqu’à présent pour les marchés émergents. Les deux premiers mois ont été particulièrement forts pour la plupart des devises, surtout en Amérique latine. Cependant, mars a marqué une tout autre dynamique, avec une détérioration du sentiment due à Trump, à la guerre commerciale et aux inquiétudes concernant l’affaiblissement de la croissance économique aux États-Unis. Les devises asiatiques et latino-américaines ont fortement baissé par rapport à un euro fort.
Il est intéressant de noter que le peso mexicain résiste relativement bien, malgré le fait que le Mexique (ainsi que le Canada) se trouve à nouveau dans le point de mire du président Trump. En outre, pour l’instant, le gouvernement mexicain semble faire preuve de bon sens à l’égard de Trump. Après les volte-face nécessaires du président américain, le Mexique a pu obtenir un deuxième sursis pour l’imposition des droits de douane supplémentaires sur la plupart des produits d’exportation. Et il y est parvenu, entre autres, en adoptant des mesures complémentaires pour limiter le flux de drogues et de migrants illégaux vers les États-Unis. Le report s’étend jusqu’au début du mois d’avril, après quoi les négociations devraient reprendre.
Les devises d’Europe de l’Est font preuve de résilience
Jusqu’à présent, 2025 a été une bonne année pour les devises d’Europe de l’Est qui ont particulièrement bien résisté par rapport à un euro fort, y compris au mois de mars dans le contexte de volatilité. La fin de la guerre profiterait à l’Europe de l’Est, mais la région bénéficiera également du redressement budgétaire de l’Allemagne et de l’augmentation des dépenses de défense au sein de l’UE.
En tant qu’économies très ouvertes, des pays comme la Pologne, la Hongrie et, en particulier, la République tchèque dépendent largement de la demande de l’Allemagne et du reste de l’UE. Le gigantesque plan d’investissement de l’Allemagne donnera également une impulsion positive. De plus, les devises de l’Europe de l’Est ont une valorisation relativement attrayante, le positionnement reste encore assez bas et les taux d’intérêt locaux offrent des rendements intéressants. Ces derniers sont également soutenus par des banques centrales plutôt caractérisées par une orientation de type « faucon ».