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L'Europe prend les commandes

» L’indépendance stratégique prévaut, y compris pour les médicaments
» La Commission européenne introduit le « Critical Medicines Act » (la loi sur les médicaments critiques)

De la pandémie à la préparation : comment l’Europe sécurise son approvisionnement en médicaments

Le paysage géopolitique de 2025 ressemble à une véritable poudrière. Ce n’est pas seulement dans les domaines de la défense, de l’énergie et de la technologie que la réflexion stratégique prend aujourd’hui le pas sur la coopération (internationale). Les tensions s’intensifient également entre les superpuissances dans le domaine de la production et de l’approvisionnement de médicaments. Alors que les pénuries subies lors de la pandémie de Covid sont encore fraîches dans notre mémoire, les chaînes d’approvisionnement et l’échange de technologies médicales sont soumis à un examen critique minutieux.

En mars, la Commission européenne a donc présenté le Critical Medicines Act (CMA), un plan ambitieux visant à garantir la disponibilité des médicaments essentiels au sein de l’UE. Le CMA est un instrument polyvalent qui vise à stimuler la production nationale de médicaments critiques, tels que les antibiotiques, les analgésiques et l’insuline, tout en diversifiant les chaînes d’approvisionnement.

La proposition comprend une révision des règles de passation des marchés, en vertu de laquelle les pays ne tiendront plus compte exclusivement du prix, mais accorderont également la priorité à la sécurité de l’approvisionnement. Des critères tels que les obligations en matière de stocks, le nombre de fournisseurs, le suivi de la chaîne d’approvisionnement et la transparence joueront un rôle décisif dans l’attribution des marchés. En outre, le plan prévoit des subventions pour des projets stratégiques, tels que le renforcement des capacités de production en Europe. Ce n’est donc pas un hasard si les entreprises pharmaceutiques souhaitent mettre les bouchées doubles pour promouvoir de nouveaux investissements européens.

Enfin, le CMA permet également aux États membres et à la Commission de procéder à des achats conjoints, l’Agence européenne des médicaments jouant un rôle important dans la gestion des pénuries éventuelles.

L’UE renforce l’approvisionnement en médicaments : le « Critical Medicines Act » doit remédier aux pénuries.

Évolution du pouvoir dans le secteur pharmaceutique : l’Europe et les États-Unis révisent leurs stratégies en matière de médicaments

En particulier, la Chine et l’Inde jouent actuellement un rôle crucial dans l’approvisionnement de l’Europe et, plus largement, de l’ensemble du monde occidental. La Chine domine le marché des matières premières médicales, à savoir les ingrédients pharmaceutiques actifs (IPA). On estime qu’environ 40 % des IPA sont actuellement produits en Chine. Dans des cas spécifiques, comme celui du chloramphénicol (un antibiotique), ce pourcentage est encore nettement plus élevé. Par ailleurs, l’Inde, souvent appelée « la pharmacie du monde », excelle dans la production de médicaments génériques finis. Selon les estimations, ce pays, qui dépend lui-même largement de la Chine pour ses matières premières, produit environ 20 % des médicaments génériques mondiaux.

Dans le cadre du CMA, notre pays devrait jouer un rôle crucial. La Belgique est le deuxième producteur de médicaments de l’Union européenne, après l’Allemagne. Quasiment tous les grands acteurs du secteur pharmaceutique sont représentés ici, les exemples les plus connus étant Johnson & Johnson (l’ancienne « Janssen Pharma ») à Beerse, Pfizer à Puurs et GlaxoSmithKline à Wavre et Gembloux. Avec des instituts de recherche de classe mondiale et un secteur biotechnologique florissant, la Belgique dispose d’un écosystème unique qui jouera un rôle clé dans la construction d’une plus grande autonomie européenne.

Il n’est donc pas surprenant que les États-Unis reconsidèrent également leur position. Avec l’introduction du Biosecure Act (loi sur la biosécurité) – un projet de loi qui a été présenté l’année dernière, mais n’a pas encore été approuvé par le Sénat – les États-Unis adoptent cependant une approche distincte. En imposant des restrictions aux efforts conjoints de R&D et aux exportations d’équipements biotechnologiques, les États-Unis, tout comme dans la course à l’IA, veulent avant tout assurer leur leadership technologique.

Équilibre entre autonomie et ouverture : le défi stratégique de l’UE

L’UE est confrontée à un délicat exercice d’équilibre : renforcer la sécurité des soins de santé sans s’isoler du monde. En outre, cette ambition doit être examinée par rapport à d’autres priorités stratégiques, ainsi que de la réalité budgétaire.

Le retour de la prise de conscience et de la confiance sont sans aucun doute des effets secondaires positifs de la dynamique géopolitique complexe en 2025.

Stijn Plessers

Stijn Plessers

Stijn Plessers est licencié en économie (Université catholique de Louvain). Il a débuté sa carrière en 2006 dans une banque privée, puis a travaillé pour KBC Asset Management pendant 15 ans. Chez KBC AM, il était initialement responsable de la gestion d'un important portefeuille de crédit et de dérivés avant de se concentrer entièrement sur les actions. D'abord comme analyste pour le secteur technologique, puis comme gestionnaire de mandats spécialisés en actions mondiales. Depuis avril 2023, Stijn est active chez Econopolis Wealth Management.

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